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éditorial / Yves de Kerdrel

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Yves de Kerdrel

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Incantations
par Yves de Kerdrel

Moody’s et Fitch ont choisi de ne pas dégrader la note de la France estimant que son profil de crédit n’était pas affecté par la dégradation des comptes publics. Un heureux sursis pour Emmanuel Macron à un moment où le Chef de l’État essaye de relancer la campagne européenne de Valérie Hayer avec un très bon discours de la Sorbonne… rempli d’incantations bien tardives.

28/04/2024 - 06:30 Lecture 9 mn.

Soulagement à Bercy vendredi vers 23 heures lorsque Moody’s et Fitch ont annoncé maintenir la note attribuée par ces deux agences de notation à la dette de l’État français. Pour la première, la France conserve donc un Aa2 et pour la seconde, un AA- avec dans les deux cas une perspective stable en dépit de l’importante dégradation des comptes publics révélée il y a seulement un mois. Rappelons que ces deux notes sont équivalentes à une sorte de 18 sur 20 si l’on voulait s’amuser à les comparer avec un cadre scolaire.

Il y a un an, Fitch avait été la première agence de notation à sonner l’alarme sur le dérapage des comptes publics français en rétrogradant la note de la France de AA à AA-. Cette fois-ci c’était surtout le jugement de Moody’s qui était attendu avec une certaine inquiétude par les pouvoirs publics. Désormais tous les regards sont tournés vers Standard & Poor's, qui rendra son verdict le 31 mai prochain. À quelques jours du scrutin européen

 

L’atout de la politique de l’offre

 

Comme l’a souligné Yoann Defrance, l’économiste de WanSquare, il faut retenir que pour justifier son choix, Moody’s a indiqué que la France était une économie de taille importante, diversifiée, riche et qui pouvait compter sur une épargne privée massive (l’épargne financière des seuls ménages représente près de 6 000 milliards d’euros) ainsi que sur une démographie favorable.

Surtout l’agence de notation n’est pas restée insensible à la politique de l’offre menée depuis une dizaine d’années. Une politique marquée entre autres par les allègements des impôts de production, la loi El Khomri, la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés, la loi Pacte ou encore les ordonnances travail. Enfin Moody’s a rappelé que "le coût de la dette française par rapport à celui de ses pairs continue de soutenir le profil de crédit de la France, bien que le resserrement de la politique monétaire entraîne une augmentation progressive des charges d’intérêts", avance Moody’s. Ces dernières devraient atteindre 55 milliards d’euros cette année pour l’ensemble des administrations publiques.

 

Débat sans vote

 

Justement, demain, à l’occasion de la reprise des travaux parlementaires, les députés auront un débat sans vote sur l’orientation et la programmation des finances publiques, avant que les sénateurs prennent le relais mardi 30 avril. Le président de la commission des Finances Éric Coquerel et Aurélie Trouvé pour LFI, Jean-Philippe Tanguy pour le RN, Boris Vallaud pour le PS et Véronique Louwagie pour Les Républicains interpelleront Bruno Le Maire, qui aura l’appui de Jean-Paul Mattéï (Modem), de Lise Magnier (Horizons) et de Mathieu Lefèvre (Renaissance).

Devant la commission des finances de l’Assemblée nationale, le ministre délégué aux Comptes publics, Thomas Cazenave, avait présenté et défendu, il y a dix jours la trajectoire financière prévue par l’exécutif, avec pour objectif un déficit public sous la barre des 3 % du produit intérieur brut en 2027. Auditionné juste avant lui, le président du Haut Conseil aux finances publiques, Pierre Moscovici, a alerté sur la difficulté à respecter le scénario fixé par l’exécutif, dans un contexte de ralentissement de la croissance et de diminution des recettes. Il avait jugé, à cette occasion, que le programme de stabilité présenté par le gouvernement "manque de crédibilité et de cohérence".

 

Une taxe légitime mais minime

 

Selon nos informations, le gouvernement a retenu comme principale piste d’économie pour 2025, une probable désindexation des pensions et retraites. En conseil des ministres, le Chef de l’État avait pourtant exclu cette hypothèse il y a quelques jours. Car il n’est pas question d’en faire mention avant les élections européennes, dans la mesure où les retraités restent le principal soutien de la liste Renaissance incarnée par Valérie Hayer qui peine dans les sondages.

En matière de taxation, la seule piste désormais certaine est celle d’un impôt de 1 % sur les rachats d’actions. L’an passé le montant des rachats d’actions opérés en France a atteint une trentaine de milliards d’euros. Cet impôt légitime, tant les rachats d’actions constituent une aberration économique, financière et même boursière, rapporterait seulement 300 millions d’euros. Soit moins que le fait de rétablir un impôt sur les sociétés normal pour des armateurs comme CMA-CGM qui ne payent qu’une très faible taxe au tonnage.

 

Lucidité macronienne

 

Si deux tiers des Français, selon un sondage Odoxa-Backbone publié hier par Le Figaro, disent ne pas avoir entendu parler du discours de la Sorbonne prononcé jeudi matin par Emmanuel Macron, et si deux tiers de ceux qui disent l’avoir suivi jugent que le chef de l’État n’a pas été convaincant, ce n’est pas notre avis. Il s’agissait d’un très bon discours en dehors de son format toujours trop long. Après avoir opté lors du premier discours de la Sorbonne pour le concept d’Europe souveraine, le Président de la République est revenu à l’idée gaullienne d’une "Europe-Puissance". Ce qui passe, pour lui, par une nouvelle initiative européenne de défense. Mais surtout pas un nouvel élan de prospérité économique.

Et sur ce point le constat du chef de l’État est lucide : "Nos objectifs sont clairs, mais nous n’y sommes pas et nous ne pouvons pas les tenir avec nos règles actuelles. Nous n’y sommes pas. Nous n’y sommes pas parce que nous sommes décalés par rapport à la recomposition du monde. Nous n’y sommes pas parce que nous réglementons trop, nous investissons trop peu et nous sommes trop ouverts et ne défendons pas assez nos intérêts… Donc il faut, là aussi, bâtir un nouveau paradigme de croissance et de prospérité… Parce que si nous le faisons avec les règles de politique de concurrence, de politique commerciale, de politique monétaire et budgétaire qui sont les nôtres aujourd’hui, nous n’y arriverons pas. Et ça se fera avec un ajustement simple, c’est que nous perdrons la production.".

 

La surprise Glucksmann

 

Après des semaines durant lesquelles le Président de la République n’a fait naître que des peurs, nous l’avons enfin vu allumer quelques lueurs d’espérances en termes de recherche, d’innovation ou de libéralisation en parlant d’espace, d’intelligence artificielle, de physique quantique, ou en évoquant cette nécessaire union des marchés de capitaux qui pourrait s’appeler union pour l’épargne et l’investissement.

Le problème, c’est que tout cela arrive bien tard. Et le décrochage de l’Europe par rapport à l’Amérique ou à l’Asie, dont Emmanuel Macron a très bien fait le constat dans la première partie de son discours, nourrit aujourd’hui les colères qui profitent surtout au Rassemblement National. Car en matière de populisme, les Insoumis ne sont plus aujourd’hui que dans une pitoyable course effrénée à la clientèle politique anti-israélienne. Heureusement la montée régulière de Raphaël Glucksmann montre qu’il existe peut-être un espoir de renouveau social-démocrate à gauche de l’échiquier politique français. Les deux ou trois prochaines semaines seront décisives pour lui, surtout si lors de son meeting du 7 mai, Valérie Hayer n’arrive pas à inverser sa spirale baissière.

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