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Feuilleton de l'été / Groupe ADP / Justine Coutard / Paris-Orly / aéroport / aéroport Paris-Orly

Feuilleton de l'été
Groupe ADP / Justine Coutard / Paris-Orly / aéroport / aéroport Paris-Orly

exclusif Série d’été – ces jeunes talents qui construisent la France de demain / Justine Coutard, directrice de l’aéroport Paris-Orly

EXCLUSIF.

Être au cœur de l’action publique, au service de l’intérêt général, tout en apportant sa pierre à la transition environnementale. Le rôle de Justine Coutard à la tête de l’aéroport Paris-Orly concentre beaucoup de ses aspirations essentielles. Au sein du Groupe ADP, au statut privé mais dont l’Etat reste majoritaire, cette macroniste passionnée de finances publiques peut varier les focales, comme elle aime à le faire, entre prise de recul stratégique et aspects concrets du terrain.

25/08/2023 - 09:30
Portrait de Justine Coutard, directrice générale de l'aéroport Paris-Orly - Irene de Rosen
Portrait de Justine Coutard, directrice générale de l'aéroport Paris-Orly - Irene de Rosen

Il y a ceux qui analysent, qui commentent, qui font de la recherche, et ceux qui sont à la manœuvre. Âgée de 37 ans, Justine Coutard appartient à la seconde catégorie. "Assez vite, je me suis aperçue que c’était cet univers qui m’attirait le plus", explique la directrice de l’aéroport Paris-Orly dans un entretien à WanSquare.

Un choix binaire, guidé par l’un de ses professeurs de philosophie de classe préparatoire qui "avait coutume d’opposer le monde de la contemplation et celui de l’action pour caractériser les choix qui s’ouvraient à nous ensuite sur le plan professionnel ", se rappelle cette native de Picardie, originaire de Bienville près de Compiègne.

Ses parents enseignants ne lui ont pas transmis leur vocation mais le goût de l’intérêt général. Si son parcours à l’Ecole normale supérieure lui fait comprendre que le monde de l’enseignement supérieur et de la recherche n’est pas fait pour elle, un stage en ambassade l’amène à prendre conscience en revanche de son envie d’être au cœur de l’action publique.

Elle bifurque donc vers Science Po, où elle suit un master affaires publiques, y découvre les finances publiques comme une révélation et fait un stage long au bureau de l’éducation nationale de la direction du Budget, expérience qui la convainc que "c’était cette voie là que j’avais envie de suivre", se souvient-elle. Puis direction l’ENA, dont elle sort parmi les élèves les mieux classés de sa promotion, ayant ainsi le privilège d’intégrer le corps d’Etat de son choix. Ce sera l’inspection générale des finances.

 

Au cœur du réacteur

 

Là encore, "je n’avais pas envie d’être en surplomb de l’action publique ", explique Justine Coutard. " Je n’aurais pas pu être juge par exemple", assure-t-elle. Son rôle de (haut) fonctionnaire, elle l’envisage au service de l’exécutif. "Je voulais vraiment faire partie de la grande équipe de ceux qui agissent au quotidien", souligne la trentenaire.

Ainsi enchaîne-t-elle une série de missions diverses et variées, de vérification et d’audit, d’évaluation et de conseil ou encore d’assistance auprès d’administrations, toujours en équipe, ce travail collectif lui convenant bien. Puis elle devient inspectrice des finances chargées de mission auprès de la cheffe du service.

Nous sommes en 2015, Justine Coutard vient de servir l’Etat pendant quatre ans et décide de rejoindre le Groupe ADP, la première plateforme aéroportuaire mondiale, entreprise au statut hybride ayant la particularité d’être contrôlée par la puissance publique, tout en étant détenue à 49,4 % par des intérêts privés. "Un aéroport est au carrefour de beaucoup de politiques publiques. Ce sont des enjeux évidemment de transport, de mobilité, d’aménagement du territoire, de connectivité, de tourisme, d’attractivité de la France. Et puis, très localement, ce sont aussi des questions majeures d’organisation, d’urbanisme, d’aménagement du territoire, de lien avec les riverains ", explique-t-elle avec passion.

Elle est enfin "au cœur du réacteur", dans un modèle unique d’entreprise qui lui correspond particulièrement bien. La jeune dirigeante y voit "un bel équilibre entre une dimension de service public très forte et un pied dans le privé avec une exigence de rentabilité". Un mariage de deux cultures "vraiment enrichissant " à ses yeux.

D’abord nommée secrétaire générale de la direction générale des opérations aéroportuaire, elle se voit confier un rôle très opérationnel, étant à la fois responsable d’une unité s’occupant de la maîtrise d’ouvrage de chantiers et directrice de la qualité clients. "Ensuite, j’ai été rattrapée par mon profil financier", raconte-t-elle amusée. Elle devient directrice des finances, de la gestion et de la stratégie du Groupe ADP, un poste beaucoup plus transversal, qu’elle n’occupera cependant pas très longtemps.

 

Gérald Darmanin

 

Le début du premier quinquennat d’Emmanuel Macron vient chambouler ses plans. Elle est appelée à rejoindre le cabinet de Gérald Darmanin, alors ministre de l’Action et des Comptes publics au sein du gouvernement d’Edouard Philippe. "Il y avait là un alignement des conditions que je ne pouvais pas laisser passer", se souvient-elle. Un début de mandat est toujours marqué par un élan, une dynamique, un souffle, et surtout, l’engagement est conforme aux convictions de celle qui se définit toujours comme macroniste. Qui plus est, on lui offrait le portefeuille qui lui convenait le mieux : les finances publiques, le budget, l’action publique, soit "une équation assez incroyable", souligne-t-elle.

Si le contexte est enthousiasmant, la réalité du poste l’est tout autant. Le pari de rejoindre Gérald Darmanin, qu’elle ne connaissait absolument pas, fonctionne. " Cela a été une vraie rencontre. J’ai appris énormément à ses côtés sur la manière d’agir, de comprendre les sujets, de les digérer et les restituer de la manière la plus claire et convaincante, sous un angle plus politique aussi ", raconte Justine Coutard.

Travailler avec ce ministre qui va au fond de ses dossiers et avec qui il est possible d’avoir de vrais débats de fond lui donne justement à voir la facette noble de la politique. Elle mènera d’ailleurs elle-même une petite campagne, "à titre amical ", aux municipales à Compiègne, dont elle garde un excellent souvenir. Puis elle prendra son bon de sortie lorsque Gérald Darmanin sera nommé ministre de l’Intérieur lors du remaniement de juillet 2020, pour revenir au sein du Groupe ADP quelques mois plus tard.

Ce retour aux sources la ravit tant elle apprécie cette entreprise, d’autant qu’elle prend alors la direction de l’aéroport de Paris-Orly, poste opérationnel s’il en est, synthèse de ce à quoi elle aspire : "cette alternance de positionnement en matière d’action publique que je trouve extrêmement enrichissante, entre une focale très stratégique et une autre beaucoup plus opérationnelle", explique-t-elle. Une façon de varier les points de vue et d’être aux manettes, avec une dimension très incarnée et des chantiers tout à fait concrets.

D’autre part, revenir à Orly lui permet de renouer aussi avec ses convictions en matière environnementale et d’y trouver un terrain d’application particulièrement stimulant. Dès son arrivée, elle met l’accent sur les sujets de décarbonation et de transition environnementale de l’aéroport, "qui sont de loin ma priorité ", souligne-t-elle. Dans le cadre du plan stratégique "2025 Pioneers" de Groupe ADP, Paris-Orly joue justement un rôle de démonstrateur sur ce sujet de la transition environnementale. "Aussi parce que Paris-Orly est un aéroport très urbain, c’est pourquoi cela a vraiment du sens", précise-t-elle.

 

Transition environnementale

 

Lorsqu’on lui demande comment elle s’imagine dans quelques années, cette jeune maman de deux jeunes enfants, par ailleurs membre de la réserve citoyenne de la Légion étrangère, ne pense qu’à poursuivre le chantier de transition environnementale de Paris-Orly. Un projet à grande échelle, qui implique l’ensemble de la communauté aéroportuaire, c’est-à-dire non seulement le Groupe ADP, mais aussi toutes les entreprises travaillant à l’aéroport, tant les compagnies aériennes que les assistants en escale, les prestataires de sûreté, de nettoyage, d’entretien des espaces verts, ou encore les hôteliers.

Tous sont engagés dans l’atteinte d’objectifs chiffrés, le plus emblématique étant le "zéro émission nette" de CO2, au sol, visé pour 2030. Un but ambitieux qui suppose de basculer massivement sur l’électrique, " la mère de toutes les batailles", souligne-t-elle, mais également de travailler méthodiquement sur tous les process, toutes les sources d’émission de CO2 afin de trouver des alternatives.

C’est ainsi que l’aéroport Paris-Orly dispose d’un puits de géothermie et utilise la chaleur issue de l’incinérateur de Rungis pour chauffer ses terminaux. Des panneaux photovoltaïques équipent peu à peu les parkings, de même que certains bâtiments, tandis qu’un projet de méthanisation est également à l’étude, en tirant là aussi partie de la proximité avec Rungis "afin de pouvoir mutualiser nos biodéchets et pouvoir produire nos propres biogaz ou biocarburants", explique Justine Coutard.

Reste également à travailler sur l’accessibilité de la plateforme, afin de basculer d’un modèle conçu pour la voiture à un modèle qui donne la priorité absolue aux transports collectifs. Un gigantesque chantier loin d’être achevé, donc, pour la jeune dirigeante, qui en apprécie tout à la fois la démarche collective et l’ambition de pionnier.

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