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Chroniques / Jean-Baptiste Noé

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Roumanie : une élection cruciale pour l’Europe
par Jean-Baptiste Noé

Élection présidentielle cruciale en Roumanie ce dimanche. Le candidat George Simion est largement arrivé en tête au premier tour et espère l’emporter au second.

17/05/2025 - 08:30 Lecture 5 mn.

Le cycle électoral roumain va-t-il trouver une sortie de crise ce dimanche ? La première élection présidentielle avait été annulée à la suite de collusions entre Calin Georgescu et la Russie. La seconde présidentielle a donné 41 % des voix à George Simion, très loin devant le maire de Bucarest, qui n’a obtenu que 21 % des voix. Dimanche 18 mai, Simion devrait être élu président, sauf retournement de situation.

 

Un large socle électoral

 

Simion bénéficie d’un large socle électoral. Dans la diaspora roumaine, dans les zones rurales, mais aussi dans les villes. Il bénéficie surtout d’un discrédit profond de la classe politique roumaine, qui souffre de corruption et qui n’a pas été en mesure de développer le pays qui demeure pauvre et aux marges de l’Europe.

La Roumanie est pourtant un pays essentiel, intégré à l’Empire romain, d’où son nom, à la frontière de la Moldavie et de l’Ukraine. Le conflit ukrainien pèse lourdement en Roumanie, ainsi que les enjeux liés à la mer Noire et à la Turquie. Ce pays est essentiel dans la géographie globale de l’Europe.

De passage à Paris, George Simion a tenu à rassurer lors d’une conférence de presse tenue devant de nombreux journalistes.

Il a d’abord affirmé soutenir l’Ukraine et a condamné la violation des frontières menée par la Russie. Pour lui, l’avenir de la Roumanie passe par l’Union européenne et par l’OTAN. La France a déployé plusieurs unités en Roumanie, pour former l’armée roumaine et pour se préparer à un choc éventuel en Ukraine. Un partenariat qu’il ne souhaite pas remettre en cause. Il accuse la Russie de semer le chaos en Europe centrale, la Roumanie étant en première ligne en cas d’instabilité en Moldavie et de tourmente en mer Noire. La présence russe a laissé un mauvais souvenir dans le pays, ainsi que la période soviétique.

Sur le plan européen, George Simion revendique un axe politique conduit avec Giorgia Meloni et Viktor Orbán. Une ligne critique à l’égard de l’Union européenne, mais sans volonté d’en sortir. Bucarest a besoin des financements de l’UE pour poursuivre son développement et sa modernisation.

 

Un enjeu géopolitique

 

Mais son discours en faveur de l’Union européenne et contre la Russie ne manque pas d’incohérence. Il a promis, s’il était élu, de nommer Calin Georgescu comme Premier ministre qui, lui, est ouvertement anti UE et pro russe. Est-ce uniquement par stratégie électorale, afin de capter les voix du trublion ou par réel alignement politique ? On voit mal comment ce tandem pourrait fonctionner et durer, les deux hommes ayant des caractères et des visions politiques divergents.

Or la stabilité en Roumanie est essentielle pour le flanc est de l’Europe, notamment pour la zone en mer Noire.

La mer Noire est l’axe stratégique entre l’Europe et l’Asie centrale. C’est par elle que transitent de nombreux gazoducs et oléoduc ainsi que les céréales d’Ukraine et de Russie. Avec le contrôle de la Crimée et du port de Sébastopol par Moscou, elle est redevenue la mer des Empires : Russie au nord, Turquie au sud. Ankara n’a pas abandonné son projet de nouveau canal pour élargir le Bosphore, après avoir refait son aéroport qui ambitionne d’être un hub essentiel entre l’Asie, l’Afrique et le Moyen-Orient. Le port de Constanta, qui fut ville grecque et ville romaine, est l’ouverture de la Roumanie vers la mer Noire et le débouché de Bucarest. Dans un conflit de plus en plus ouvert avec Moscou, elle est la ville d’Europe qui borde la mer essentielle qu’est devenue la mer Noire, d’autant que d’importants gisements de gaz y ont été décelés.

Autre région stratégique de Roumanie, les Carpates, région montagneuse qui concentre de nombreux trafics. C’est là l’autre point noir de la Roumanie, pour lequel les discours en faveur de l’UE et de l’OTAN ne suffiront pas. George Simion se montre très vindicatif sur l’immigration et soucieux de défendre l’identité et la culture de son peuple. Mais la Roumanie refuse les extraditions de ses ressortissants qui, en France ou en Italie, ont commis des infractions. Un double discours qui met en froid Paris et Rome et qui sera un point chaud du futur gouvernement, que Simion soit élu ou non.

Dans la lutte contre la drogue, la France regarde beaucoup vers l’Amérique latine et l’Afrique, d’où arrivent les flux de cocaïne. Mais l’Europe centrale n’est pas en reste. Dans les trafics d’êtres humains, via les routes migratoires, et les trafics d’armes, les Carpates sont dans une situation géographique de carrefour et de trou noir de la criminalité. Et cela, il faudra beaucoup plus que des discours pour le régler.

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