Chroniques / Jean-Baptiste Noé
Chroniques
Jean-Baptiste Noé
Chronique
Zelensky en Europe : quelle suite pour la guerre ?
par Jean-Baptiste Noé
Pour son second voyage hors d’Ukraine depuis le début de la guerre, Volodymyr Zelensky a cette fois visité les grandes capitales européennes. Tentant de les convaincre de lui livrer des armes, notamment des avions, il doit surtout remobiliser ses alliés au moment où les Russes avancent sur le front du Donbass.
Après les chars, des avions ? Olaf Scholz a eu beau refuser la livraison d’avions de combat à l’Ukraine, c’est bien ce qu’est venu demander Volodymyr Zelensky à ses alliés : des avions et des missiles de longue portée. Pour sa première sortie en Europe depuis le début de la guerre, le président ukrainien a rendu visite à ses soutiens les plus importants : Paris, Berlin, Londres et Bruxelles. De quoi resserrer les liens, aplanir les inquiétudes et demander des armes à l’approche de la date anniversaire de l’invasion russe.
Livrer pour quoi ?
Si tous les pays d’Europe sont d’accord pour aider l’Ukraine, tous ne s’accordent pas sur les moyens et sur les objectifs. Jusqu’où livrer en effet ? Des armes défensives, dans un premier temps, faut-il passer aux armes offensives, quitte à pouvoir attaquer directement le sol russe ? Ce serait le cas des avions de chasse et des missiles à longue portée. Ce serait, indéniablement, une nouvelle dimension du conflit. Mais l’Europe manque d’armes et vouloir n’est pas nécessairement pouvoir. Il faut du temps pour les produire ; ce temps qui manque de plus en plus à l’Ukraine. Sur le terrain, les Russes avancent, grignotent des positions, se renflouent en hommes et en matériels et exercent une forte pression sur les troupes ukrainiennes. La visite de Zelensky en Europe peut aussi être lue comme un branle-bas de combat pour éviter une rupture du front.
Derrière les chiffres alignés du matériel fourni demeurent toujours les mêmes problèmes de la formation et de l’emploi des forces. Si le matériel est nécessaire, il n’est pas suffisant pour gagner : encore faut-il disposer d’une stratégie et d’objectifs de guerre clairement définis. Des objectifs qui divergent tant chez les Européens qu’à Washington et à Kiev. Face aux tensions sociales, à l’inflation énergétique, aux faillites d’entreprises, les pays de l’Ouest accepteront-ils de poursuivre leurs efforts et sauront-ils trouver les mots pour convaincre une opinion qui peut se lasser et ne pas vraiment voire pourquoi elle devrait payer pour un conflit lointain ? Après un an de guerre, tout reste encore à faire.
Quels moyens pour l’Ukraine ?
L’Ukraine reste persuadée qu’elle peut chasser les Russes et récupérer même la Crimée. Rien n’est moins sûr. Moscou détient malgré tout près de 20 % du territoire ukrainien et, les mouvements de population aidant, les pro-Kiev y sont de moins en moins nombreux, la russification ayant de fait débuté avec le départ des personnes opposées à Moscou. Il ne sera pas aisé non plus de reprendre la Crimée, où la population est majoritairement en faveur de la Russie. Et si tel était le cas, face à une avancée décisive des troupes ukrainiennes, tout laisse à penser que Moscou pourrait faire usage de ses bombes nucléaires tactiques, comme le prévoit sa doctrine stratégique. Seule puissance dotée de l’Union européenne, la France serait alors contrainte de se positionner et de réagir. Pourrait-elle le faire en toute indépendance et souveraineté ? Autant de questions qui sont cruciales et qui sous-tendent les livraisons d’armes. Des questions qui mériteraient d’être posées et débattues au sein du Parlement.
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