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Macron et la guerre de mouvement
par Yves de Kerdrel

Le Chef de l’État reprend l’initiative après plusieurs mois de flottement. Devant les préfets il a dessiné un cap clair et précis de son action pour les cinq ans à venir. Mais beaucoup de ses projets portent sur le très court terme, à un moment où les Français sont confrontés à une érosion de leur pouvoir d’achat. Et à l’aube d’une année 2023 durant laquelle une récession pourrait avoir lieu. Ce qui va peut-être compliquer sa « guerre de mouvement ».

18/09/2022 - 06:30 Lecture 14 mn.

 

Jeudi dernier, le Président de la République a réuni l’ensemble des préfets dans la salle des fêtes de l’Élysée. Une telle réunion n’avait eu lieu qu’une fois jusqu’à présent au début de son premier mandat. Il en a donc profité pour dessiner le cap qu’il s’est fixé pour adapter la France à la transformation de son environnement économique, géopolitique et climatique. En évoquant de nouveau cette fameuse "grande bascule du Monde" qu’il avait déjà évoquée en Conseil des Ministres ou lors de la conférence annuelle des ambassadeurs.

A l’occasion de son intervention, Emmanuel Macron a affirmé tout de go : "je crois à la vertu de la guerre de mouvement". Et l’on avait l’impression de revoir Nicolas Sarkozy au tout début de son mandat affirmant qu’il allait mener toutes ses réformes à la fois de manière à noyer ses opposants dans un "mouvement" qui n’en finit pas. Il n’est d’ailleurs pas impossible que ce soit l’ancien Président qui ait soufflé ce conseil à l’actuel locataire de l’Élysée lorsqu’ils ont dîné ensemble, cet été, au Fort de Brégançon.

 

Pourquoi Macron veut passer en force sur les retraites

 

Réforme de l’allocation-chômage, réforme du lycée professionnel, nouvelle réforme du droit de l’immigration, réforme à venir des modalités de la fin de vie, après l’avis favorable donné par le Conseil National d’éthique, et réforme des retraites. Sur ce sujet, le Chef de l’État a clairement indiqué à ses interlocuteurs vouloir presser le pas. Il est donc question non pas d’un projet de loi particulier, mais d’un simple amendement au Projet de loi de financement de la Sécurité Sociale.

Tous les ans les sénateurs républicains s’amusaient à amender ce PLFSS afin de faire passer l’âge légal de la retraite des 62 à 64 ans. Finalement Emmanuel Macron voudrait agir de la même manière. Sans que l’on sache encore s’il s’agit d’une mesure d’âge ou bien s’il s’agit d’accélérer la réforme Touraine qui concerne la durée de cotisation nécessaire pour toucher une retraite à taux plein et ne pas subir ce qu’on appelle une décote. À partir de 2020, cette durée a été relevée d’un trimestre tous les trois ans. Le point final est attendu en 2035 pour la génération 1973 ; celle-ci devra travailler 172 trimestres (soit 43 ans) pour obtenir une retraite à taux plein. Dans l’entourage d’Emmanuel Macron on parle d’une accélération de cette méthode avec une durée relevée d’un trimestre tous les ans.

 

Peu de concertation possible sur les retraites

 

Mais la méthode choisie pour faire passer cette réforme des retraites est plutôt curieuse, dans la mesure où jeudi dernier le Chef de l’État a encore largement évoqué la nécessité d’une large concertation sociale. Il n’est pas certain que les syndicats apprécient une réforme par amendement à un projet loi sans doute voté avec l’aide de l’article 49-3. De surcroît cela laisserait très peu de temps pour une concertation, le PLFSS devant être voté par les deux chambres avant la fin de l’année.

Dans une récente interview au journal Le Monde, Laurent Berger avait fermé la porte à une réforme des retraites qui se ferait sur une mesure d’âge ou sur le nombre de trimestres de cotisations. Mais à un moment où les mouvements sociaux renaissent, pour cause d’inflation et donc d’érosion du pouvoir d’achat, il n’est pas certain que cette réforme "à la sauvette" soit la plus appropriée pour une population française toujours à cran. Toujours est-il que Bercy et l’Élysée semblent très désireux de retenir cette voie qui s’inscrit dans la nouvelle "guerre de mouvement" du Général Macron.

 

Une facture énergétique qui plombe les industriels

 

Sur le front de la question énergétique, si la Première Ministre a multiplié les annonces de manière à rassurer les particuliers sur la hausse de leur facture de gaz et d’électricité et sur l’approvisionnement de ces deux énergies pendant l’hiver prochain, il n’est bien sûr pas question de tels "boucliers tarifaires" pour les industriels. Les entreprises les plus électro-intensives subissent d’ores et déjà des hausses faramineuses de leurs factures.

Même Fabien Roussel, le Secrétaire National du Parti Communiste a regretté qu’il n’y ait pas de mesures prises en faveur des entreprises, redoutant que certaines d’entre elles soient obligées de licencier ou d’avoir recours au chômage partiel comme c’est déjà le cas pour le groupe Arc. Mais le seul dispositif pour les particuliers aura déjà un impact de 45 milliards d’euros sur les finances publiques…

 

Un budget 2023 difficile à boucler

 

S’agissant du projet de loi de finances qui sera présenté en conseil des ministres le mercredi 28 septembre on a appris cette semaine que Bercy avait abaissé les perspectives de croissance économique du pays pour 2023 sans pour autant revoir son objectif de déficit budgétaire. La croissance de la deuxième économie de la zone euro devrait désormais ralentir, passant d'environ 2,5 % cette année à 1 % l'année prochaine, contre 1,4 % auparavant, a déclaré Bruno Le Maire. Malgré des perspectives de croissance plus faibles, il table toujours sur un déficit budgétaire, l'an prochain, équivalent à 5 % du PIB grâce à une bonne tenue des recettes de l'impôt sur les sociétés. Il table par ailleurs sur une inflation de 4,2 % en moyenne pour 2023 contre 5,3 % cette année.

On ne sait pas encore ce que Bercy a comptabilisé comme charge de la dette pour 2023. Mais ce qui est certain c’est que celle-ci va fortement augmenter à cause de la hausse des taux d’intérêt. Mais aussi à cause de l’inflation. Car 12 % de notre endettement public est indexé soit sur l’inflation française, soit – pire ! – sur l’inflation de la zone euro. Les encours d’obligations indexées sur l’inflation se divisent entre OAT€i d’un montant de 164,64 milliards d’euros en 2022 (indexés sur l’inflation moyenne de la zone euro) et 64,6 milliards d’OATi (indexés sur l’inflation française) soit une proportion de 72 % pour les titres indexés zone euro et de 28 % pour les titres indexés sur l’inflation domestique.

 

La Banque de France jette un froid sur les perspectives économiques

 

L'économie française va connaître à partir de cet hiver un net ralentissement avec la crise énergétique que traverse l'Europe et elle court même le risque d'une récession "limitée et temporaire" en 2023 dans le scénario le plus noir, a déclaré jeudi la Banque de France. Dans ses dernières projections macroéconomiques, la banque centrale s'attend néanmoins pour cette année à une croissance du produit intérieur brut de la France meilleure que prévu auparavant, de 2,6 %, avant un ralentissement à 0,5 % l'an prochain dans un scénario de référence basé sur les prix du pétrole et du gaz récemment observés sur les marchés à terme.

En raison des incertitudes très larges liées à l'évolution de la guerre russe en Ukraine, la Banque de France préfère cependant avancer une fourchette de prévisions pour 2023, d'une croissance de l'activité de 0,8 % à une contraction de -0,5 %, en fonction de l'évolution des prix de l'énergie et des mesures pour faire face à cette crise. "Si une récession devait arriver, elle serait limitée et temporaire, avec un net rebond en 2024", a déclaré le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, dans une interview à La Croix. En ce qui concerne l'inflation, la Banque de France la voit à 5,8 % en moyenne cette année puis dans une fourchette de 4,2 % à 6,9 % en 2023 en fonction de l'évolution des prix de l'énergie avant un ralentissement à 2,7 % en 2024. "Nous sommes fermement engagés à ramener l’inflation vers 2 % dans les deux-trois ans qui viennent", a dit François Villeroy de Galhau. Mais ce sera davantage sous le coup du ralentissement de l’économie que du fait de l’action des banques centrales qui paraissent bien démunies dans la situation actuelle, tant en Europe qu’outre-Atlantique.

 

Débat sur la dissociation des fonctions chez EDF

 

On attend toujours de connaître de nom du successeur de Jean-Bernard Lévy chez EDF. Après les refus de Benoit Ribadeau-Dumas et d’Henri Poupart-Lafarge, l’Élysée a sollicité Luc Rémont, l’actuel directeur général des Opérations Internationales de Schneider Electric en charge de l’Amérique du Sud, de l’Afrique et du Moyen-Orient, de l’Inde, de l’Asie de l’Est et du Pacifique. Il présente l’avantage d’être polytechnicien, de bien connaître le secteur privé mais aussi la sphère publique, puisqu’il a été conseiller technique, chargé des participations, puis Directeur adjoint au sein du cabinet des Ministres des Finances de 2002 à 2007.

L’Élysée aurait aimé pouvoir valider cette nomination au prochain Conseil des ministres, mais il se heurte à un problème lié la volonté de dissocier les postes de Président et de Directeur général, dans le seul but de nommer Florence Parly à la Présidence non exécutive. Promesse lui avait été faite lorsqu’elle a quitté le ministère des Armées et lorsque Martin Vial, son mari, par ailleurs très proche d’Alexis Köhler a quitté son poste de Commissaire aux participations de l’État. L’Élysée n’a manifestement pas gardé le souvenir calamiteux de la guerre entre Edmond Alphandéry et Pierre Daurès à la tête d’EDF il y a 25 ans…

 

Un banquier à la tête de Wendel

 

Enfin comme l’a révélé hier soir WanSquare en exclusivité, Le Conseil de surveillance de Wendel, réuni vendredi soir sous la Présidence de Nicolas ver Hulst, a nommé Laurent Mignon en qualité de membre et Président du Directoire de Wendel avec effet au plus tard le 1er janvier 2023. Il succédera à André François-Poncet, Président du Directoire de Wendel, qui continuera d’assurer ses fonctions jusqu’à son arrivée effective chez Wendel. Le Directoire de Wendel sera alors composé de Laurent Mignon, son Président, et de David Darmon, Directeur général et membre du Directoire depuis 2019.

Parallèlement vendredi soir, un conseil de surveillance de BPCE s’est réuni sous la présidence de Thierry Cahn au cours duquel Laurent Mignon a informé cet aréopage qu’il ne sollicitera pas le renouvellement de son mandat et de sa décision de s’engager dans un nouveau projet professionnel. Cette évolution interviendra d’ici janvier 2023 au plus tard, Laurent Mignon conservant ses fonctions de président du directoire de BPCE. Le conseil de surveillance de BPCE a par conséquent lancé un processus de succession à la présidence du directoire de BPCE. Laurent Mignon œuvrait depuis 14 ans au sein du Groupe BPCE comme directeur général de Natixis puis comme président du directoire de BPCE.

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