Chroniques / Jean-Baptiste Noé
Chroniques
Jean-Baptiste Noé
Chronique
Joe Biden en mauvaise posture et la démocratie avec lui
par Jean-Baptiste Noé
Les ennuis s’additionnent pour Joe Biden. Après son débat raté contre Donald Trump, il accumule les lapsus en conférences publiques. Aux États-Unis, les appels à son retrait se multiplient, mais sans proposition de remplacement.
Les images ont tourné en boucle et elles sont cruelles pour Joe Biden. Lors du sommet de l’OTAN à Washington, il confond sa vice-présidente Kamala Harris et Donald Trump. Puis, lors d’une conférence de presse, il appelle Volodymyr Zelensky Vladimir Poutine, avant de se reprendre. Les républicains, Donald Trump en tête, chargent le président et candidat démocrate en y voyant la preuve de son incapacité à diriger le pays. Tous les sondages donnent Trump vainqueur en novembre prochain, ce qui est de mauvais augure pour les démocrates. D’autant que cela s’ajoute à son débat raté et à de nombreux autres quiproquos qui jettent le doute sur les capacités de Biden d’assurer un mandat de plus.
Lâché par les démocrates
Que Joe Biden soit attaqué par les républicains est de bonne guerre dans une campagne électorale. Mais plus grave pour lui est le fait que de nombreux démocrates se désolidarisent de sa campagne. De gros donateurs ont ainsi cessé leurs dons, or l’argent est le nerf de la guerre dans une campagne américaine. Le New York Times, bien que journal démocrate, est à la pointe du combat contre Biden, ayant publié plusieurs articles et éditoriaux appelant à son départ. Dernière en date, celle de George Clooney, qui a publié sur le site du journal une tribune sévère demandant le retrait du candidat : "Nous ne gagnerons pas en novembre avec ce président" écrit-il, en demandant aux gouverneurs et aux parlementaires de faire pression sur l’équipe de Biden pour qu’il se retire.
Cette tribune n’est pas que la énième intervention d’un artiste dans une campagne électorale mais un véritable coup de semonce. Clooney est un pilier du camp démocrate, qui participe à de nombreuses levées de fonds : "Le mois dernier, j’ai coprésenté la plus grande levée de fonds jamais organisée pour un candidat démocrate" prend-il soin de préciser. Une tribune qui a été publiée avec l’accord de Barack Obama, qui agit en sous-main pour trouver une autre solution. Ce que les démocrates craignent, ce n’est pas tant l’incapacité de Joe Biden qu’une victoire de Donald Trump. Ils cherchent donc un candidat qui soit mieux placé pour l’emporter. Mais il n’y en a pas.
Oublis de Biden et maladie de la démocratie
En 2020, Joe Biden était déjà le candidat par défaut d’un camp démocrate qui voulait empêcher la victoire de Bernie Sanders aux primaires. Trop gauchiste, trop marxiste aux yeux des démocrates modérés, Sanders était pour beaucoup l’assurance d’une réélection de Trump. Biden avait donc endossé par défaut le costume de candidat. Quatre ans plus tard, les démocrates n’ont toujours pas réussi à se réinventer et à faire émerger de nouvelles figures. Que ce grand et ancien parti ne soit pas capable de trouver des candidats plus jeunes et expérimentés témoigne d’un malaise profond dans la démocratie américaine. Aux États-Unis, la politique n’attire plus les élites, le personnel politique est démonétisé. Or ce qui se passe aux États-Unis touche aussi directement la France et l’Europe. Certes, une démocratie vit par son peuple, mais elle vit aussi par ses représentants. Encore faut-il que ceux-ci soient aimables et que la population puisse s’identifier à eux et en être fière.
Les Soviétiques étaient-ils fiers de leur gérontocratie des années 1980 et des hommes du KGB malades et impotents qui se succédaient sur la place Rouge ? La force d’un Vladimir Poutine et d’un Xi Jinping, c’est qu’ils sont respectés par une grande partie de leur population parce qu’ils renvoient une image de puissance, de force et donc de fierté. Comme Hô Chi Minh, Nasser et Castro en leur temps. Ce n’est pas le cas d’un président affaibli comme Biden ou clivant comme Trump. On est loin de l’époque où Richard Nixon en 1972 et Ronald Reagan en 1984 raflaient 49 États sur 50, preuve d’un consensus et d’une solidité de la démocratie américaine.
Le politique n’est pas le sauveur, mais la défiance à son égard mine la cohésion nationale et la confiance civique. Que Biden se retire ou non, ce manque de confiance est une fragilité dommageable pour les démocraties, d’autant plus quand les régimes autoritaires se renforcent et s’associent pour peser sur la scène du monde.
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