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Chroniques / Jean-Baptiste Noé

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La Chine programme « la nouvelle productivité »
par Jean-Baptiste Noé

Pour répondre aux transformations démographiques du pays et pour devenir la première puissance mondiale, la Chine a lancé le programme de « la nouvelle productivité ». Une transformation en profondeur de son industrie pour changer de paradigme.

14/09/2024 - 08:30 Lecture 5 mn.

Les Chinois n’ont pas lu Jean Fourastié, connu en France pour avoir forgé l’expression "Trente glorieuses" dans son célèbre ouvrage Les Trente glorieuses ou la révolution invisible (1979). C’est pourtant à une mise en place des principes démontrés par l’économiste qu’ils sont en train de se livrer. À travers ses nombreux livres, Jean Fourastié a en effet démontré que la puissance économique, et donc le développement, ne repose pas sur la production, mais sur la productivité. Et c’est parce que la France a fortement augmenté sa productivité, à partir de 1900, mais surtout à partir de 1945, qu’elle a pu connaître une phase continue de croissance qui a abouti à une transformation radicale de sa structure sociale et productive, passant d’une économie primaire à une économie tertiaire avec une phase de transition que fut l’importance du secteur secondaire. Mécanisation, robotisation, informatisation sont quelques-uns des piliers qui ont permis ce développement de la productivité.

 

Changer les structures

 

C’est exactement cette optique qui est aujourd’hui suivie par la Chine. Elle aussi est passée d’une économie reposant sur l’agriculture à une économie reposant sur l’industrie. Cela lui a notamment permis de sortir de la famine et de devenir aujourd’hui la deuxième puissance économique mondiale. Une croissance sans précédent dans l’histoire qui a permis à ce pays de passer du tiers-monde au monde développé en quelques décennies seulement. Face aux nouveaux défis qui l’attendent, Xi Jinping et les cadres du parti ont désormais lancé la phase de "la nouvelle productivité". Il s’agit d’accroître la mécanisation des usines, le développement des robots, l’intégration de l’informatique dans les chaînes de production.

Conséquence de la politique de l’enfant unique la Chine va être confrontée, dans les vingt ans qui viennent, à une baisse et un vieillissement de sa population. Un manque de main-d’œuvre qui va être en partie compensé par la mécanisation accrue de ses usines. Le port de Shenzhen est aujourd’hui quasiment entièrement mécanisé, les robots ayant remplacé les dockers. Il en va de même d’une grande partie des usines, qu’elles soient dans l’automobile, les batteries, les machines : les chaînes de production se passent de main-d’œuvre ; ce sont les robots qui travaillent. Ce qui signifie une nécessité de disposer d’une énergie abondante et sûre pour alimenter les machines, et d’une structure informatique qui fonctionne parfaitement afin d’assurer les communications des machines entre elles. Il y a cinq ans, le gouvernement chinois a lancé un plan pour équiper les villes en 5G, plan quasiment achevé. Désormais, c’est la 5,5G qui est déployé pour réduire les temps de latence des communications des machines entre elles. La nouvelle mécanisation a besoin de la 5G pour être plus performante et donc plus productive.

D’où l’importance extrême de l’IA, qui est perçue elle aussi comme un réservoir pour accroître la nouvelle productivité. Que ce soit le développement des voitures autonomes, la mécanisation des mines, qui se font de plus en plus sans mineur, les échanges humains et les communications, l’IA est encouragée, car perçue comme le moyen de transformer l’industrie afin de prendre l’ascendant sur les États-Unis. Pour les dirigeants chinois, le pilier de la puissance de la Chine, c’est l’industrie. Pour eux, la Chine doit redevenir le pôle mondial de la production manufacturière. Mais cela ne passe pas par plus d’ouvriers, mais par plus de productivité, c’est-à-dire des usines sans ouvrier mais avec de nombreux ingénieurs.

La Chine en forme 8 millions par an, qui sortent de ses nombreuses écoles situées dans tout le pays. Les industries européennes ont leur rôle à jouer dans ce schéma puisqu’un bon nombre de machines et de robots sont encore conçus et fabriqués par des entreprises européennes. Jusqu’à quand ? "La nouvelle productivité" est un défi lancé en interne, car il suppose une transformation radicale des chaînes de production, avec les problèmes de formation et de réemploi des ouvriers que cela suppose, et un défi, aussi, lancé au monde et notamment aux Occidentaux, puisque la Chine se veut toujours l’atelier du monde, mais un atelier sans ouvrier, un atelier qui se modernise et qui se prépare à affronter les défis techniques des vingt prochaines années.

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