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Chroniques / Jean-Baptiste Noé

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Jean-Baptiste Noé

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Europe : face aux ennemis, multiplier les partenariats
par Jean-Baptiste Noé

Dans la tourmente de la diplomatie "trumpienne", les pays d’Europe s’interrogent quant à la voie à suivre. Loin d’être un bloc uni, chaque pays a ses intérêts et sa vision du monde. Les partenariats et les coopérations ponctuelles, en fonction des sujets, restent la meilleure façon de pouvoir faire avancer le continent. 

15/03/2025 - 08:30 Lecture 5 mn.

C’est une première qui a marqué les esprits. Lors du forum de Paris sur la défense et la stratégie, qui s’est tenu à l’École militaire du 11 au 13 mars, les chefs d’état-major de 37 pays se sont retrouvés pour une réunion commune consacrée à la défense de l’Ukraine. Réunion qui était placée sous l’égide du chef d’état-major français. Le lendemain, ce sont cinq ministres de la Défense européens qui se sont retrouvés, pour échanger sur les dangers qui menacent l’Europe. Un format dit "E5", qui réunissait les ministres de la France, de l’Allemagne, de la Pologne, de l’Italie et du Royaume-Uni. Dans les travées du forum de Paris, des officiers supérieurs hongrois ont pu échanger avec des homologues italiens, des Espagnols discourir avec des officiers des pays baltes. Ce dont témoignent ces échanges, officiels pour certains, informels pour d’autres, c’est la recomposition du fonctionnement européen sur des bases de coopérations et de partenariats ponctuels en fonction des intérêts de chaque pays.

 

Pas d’unité européenne

 

L’Europe, comme bloc uni, partageant les mêmes intérêts et donc les mêmes objectifs, n’existent pas. En revanche, ce qui organise les relations des pays entre eux, ce sont des intérêts ponctuels qui peuvent varier et s’adapter en fonction des évolutions de l’ennemi et des menaces. Si les pays baltes et la Pologne sont directement concernés par le flanc Est et la menace que fait peser la Russie, ce n’est pas le cas de l’Espagne et du Portugal, qui sont eux menacés par le flanc sud, notamment les routes migratoires et les soubresauts du Maghreb. Quant aux Grecs et aux Chypriotes, leur grande inquiétude demeure la Turquie et les enjeux gaziers en Méditerranée orientale. Il est normal qu’une géographie différente implique des politiques différentes. Ce ne peut donc être que par des coopérations au cas par cas que peut se bâtir l’unité des Européens.

 

Format E5

 

La réunion du format E5 apporte à cet égard une évolution intéressante. Conscients qu’une réunion à 27 empêche la prise de décision, les Européens se sont réunis dans un format plus réduit, qui permet également d’intégrer le Royaume-Uni. Une manière de palier les conséquences du Brexit. Les cinq ministres qui se sont réunis représentent les pays d’Europe qui ont les armées les plus puissantes, ou qui aspirent à l’avoir.

La Pologne n’a jamais caché ses ambitions de disposer de la première armée en Europe, qui sera entièrement tournée vers l’ennemi russe. Il lui faut donc de l’argent, du matériel, des munitions et des hommes. L’Allemagne aussi veut réarmer, ce qui revient à briser le statu quo établi depuis 1945. Encore faudra-t-il convaincre sa population, d’autant que le tropisme pro-russe est beaucoup plus présent en Allemagne qu’en Pologne. Varsovie et Berlin ne partagent pas du tout la même vision de ce que doivent être les relations avec Moscou.

Le Royaume-Uni revient ainsi sur la scène européenne continentale, lui dont le soutien à l’Ukraine est sans faille depuis l’invasion de 2022. Il a néanmoins du mal à cacher ses grandes difficultés de recrutement, notamment pour sa marine. Des problèmes que rencontrent également la France et l’Italie. Si chaque pays est d’accord pour réarmer et monter en puissance, encore faut-il trouver l’argent pour cela, et donc faire accepter à leur population que le budget général se fera avec moins de social et plus de militaire.

Les Européens sont en train de mesurer l’impasse des grandes réunions à Bruxelles, qui durent des nuits entières et qui accouchent de déclarations soporifiques sans contenu concret. En revenant à des formats de coopération plurinationale ils gagnent en souplesse et en efficacité. Face à la menace russe d’un côté et au retrait américain de l’autre, les pays d’Europe ont donc été contraints de revoir leur manière de prendre des décisions et de s’organiser. Ce qui conduit à bâtir une Europe plus concrète et plus réaliste. De quoi mener des politiques qui sont plus lisibles pour les citoyens européens, et plus efficaces pour les États. Vladimir Poutine et Donald Trump, bien malgré eux, contribuent ainsi à renforcer l’action stratégique européenne.

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