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éditorial / Yves de Kerdrel

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Yves de Kerdrel

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À droite toute !
par Yves de Kerdrel

Faute de trouver des soutiens à gauche, ou même chez Renaissance, Michel Barnier n’a pas d’autre choix que de se tourner vers sa famille politique pour composer son gouvernement. Après avoir milité pour un « soutien sans participation » le parti dirigé par Laurent Wauquiez se dispute les meilleures places autour du conseil des ministres sans savoir quelle politique sera menée.

15/09/2024 - 06:30 Lecture 10 mn.

Il y a deux semaines, alors que la France peinait à se trouver un Premier ministre, il était de bon ton de dire que le projet était plus important que le nom du nouveau locataire de Matignon. Maintenant que Michel Barnier occupe le 57 rue de Varenne, plus personne ne se demande ce que sera son projet ; s’il en a un. En revanche ils sont nombreux à attendre un coup de téléphone afin de faire partie du gouvernement, ou à organiser des fuites dans la presse pour expliquer à quel point leur expérience est nécessaire à la réussite du nouveau cabinet.

De la même manière, le virage à 180 degrés du parti Les Républicains est assez stupéfiant. Il y a deux semaines, Laurent Wauquiez répétait à qui voulait l’entendre que la droite républicaine n’avait pas pour ambition de jouer "les supplétifs de la macronie finissante". Et lors des journées parlementaires qui se sont déroulées cette semaine à Annecy, tous les éléphants de LR se pressaient autour de Michel Barnier pour l’assurer de leur soutien chaleureux et lui glisser un mot sur le portefeuille qu’ils aimeraient avoir.

 

Les Républicains se voient en prestidigitateurs

 

Si Michel Barnier a annoncé que son gouvernement serait formé au cours de la semaine qui vient, peu nombreux sont ceux qui attendent une annonce avant mercredi. Ce qui reportera au 25 septembre la tenue éventuelle d’un nouveau conseil des ministres. À la veille de ce week-end, on parlait d’Annie Genevard pour le ministère de l’Éducation, de Bruno Retailleau pour l’Intérieur (bien qu'il hésite à laisser à Philippe Bas ou à Roger Karoutchi la présidence du groupe LR au Sénat), de Laurent Wauquiez ou Valérie Pécresse pour Bercy (après le refus poli de Didier Migaud), de Philippe Juvin à la Santé, de Francis Szpiner à la Justice et du maintien de Sébastien Lecornu aux Armées. En revanche la position ambiguë de Gérald Darmanin semble lui créer des difficultés pour rejoindre le Quai d’Orsay. De fait, ces derniers jours il était question d’Hubert Védrine voire du maintien de Stéphane Séjourné.

Du côté de Renaissance et de la gauche sociale-démocrate, la liste reste courte de ceux qui sont prêts à participer à ce gouvernement. Il y a Aurore Bergé, ancienne UMP, qui se verrait bien rester. Idem pour Catherine Vautrin qui est demeurée une chiraquienne dans l’âme. De même pour Rachida Dati qui n’a jamais été exclue de LR. On évoque aussi le nom de Juliette Méadel, ancienne secrétaire d’état de François Hollande ou de la députée Renaissance Maud Brégeon. Bref, le futur gouvernement Barnier devrait avoir une forte coloration LR. Ce qui faisait dire à l’un des ténors de ce parti cité par Le Parisien ce propos davantage cynique qu’ironique : "Nous sommes des prestidigitateurs ! Nous avons à peine 47 places sous le chapiteau (N.D.L.R. par référence au nombre de députés) et c’est nous qui dirigeons le cirque !"

 

Le "montagnard" n’a pas apprécié l’autocélébration de Le Maire

 

Toute la droite est donc prête à participer au gouvernement sans connaître un seul mot de la feuille de route que Michel Barnier s’est fixée. Puisque même si le Premier Ministre fait beaucoup de communication, c’est seulement pour rappeler qu’il est un montagnard (non pas au sens de l’assemblée de 1791 heureusement !) qu’il sait où il va et qu’il est plein d’humilité. Quant à sa déclaration de politique générale, elle ne devrait pas avoir lieu avant le début octobre. Et personne ne sait encore si elle donnera lieu à un vote de confiance ou pas. Ce qui est certain, c’est qu’il ne reprendra pas toutes les mesures du "pacte législatif" rédigé pendant l’été par Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau.

Michel Barnier a bien conscience des difficultés budgétaires. Il a déjeuné mardi dernier avec Bruno Le Maire et Thomas Cazenave en présence de son directeur de cabinet Jérôme Fournel (ex-dircab de Le Maire). Et depuis il multiplie les petites phrases sinon assassines, du moins caustiques, contre le ministre de l’Économie démissionnaire, son incapacité à enrayer les déficits budgétaires et la montagne de dette qu’il a créée en sept ans. Manifestement l’autocélébration par Bruno Le Maire de son propre bilan, dans la cour d’honneur de Bercy, est mal passée, aussi bien à Matignon qu’à l’Élysée.

 

Un rôle crucial pour Michel Cadot

 

Le cabinet de Michel Barnier, qui n’aura plus de conseillers partagés avec l’Élysée, est encore loin d’être constitué. Seules ont été mentionnées au Journal officiel, les nominations de Jérôme Fournel, comme directeur de cabinet et de Michel Cadot comme chargé de mission sur les affaires régaliennes. Cet ancien préfet de la région Île-de-France, selon nos informations, va surtout avoir comme rôle de garder un lien très étroit avec tous les élus et les acteurs des collectivités et territoires. Une mission essentielle, tant jusqu’ici, un certain nombre de parlementaires pouvaient avoir le sentiment d’être déconsidérés. Le parcours de Michel Cadot explique sans doute cette nomination à ce poste clé. Sa relation privilégiée avec Michel Barnier aussi.

Entre 2007 et 2009, il était son directeur de cabinet au ministère de l’Agriculture et de la Pêche avant de diriger le cabinet de Michèle Alliot-Marie au ministère de l’Intérieur. En 2020, il avait succédé à Jean Castex au poste de délégué interministériel aux Jeux olympiques et paralympiques. À ses côtés, il pourra compter sur le fils de l’ancien député Alain Marleix et frère de l’ex-patron des députés LR Olivier MarleixRomain Marleix, jusqu’ici directeur de cabinet du président du Conseil départemental du Cantal Bruno Faure, devrait donc occuper le poste de conseiller parlementaire du Premier ministre.

 

Beaucoup d’inconnues sur le budget

 

S’agissant du projet de loi de finances pour 2025, il est désormais clair que les délais usuels ne seront pas respectés. Ce qui va dans le sens de la recommandation faite par Pierre Moscovici, le premier président de la Cour des comptes, qui est aussi le président du Haut Conseil des Finances publiques, chargé de valider ou pas les hypothèses budgétaires. Des coupes importantes sont attendues en matière d’aides à l’apprentissage ou à la transition énergétique. De la même manière, le budget des armées, que l’on croyait "sanctuarisé" avec le vote, il y a un an, de la loi de programmation militaire, devrait être raboté, en dépit des alertes de nos chefs militaires.

Du côté du patronat, on se contente de faire passer des messages sur les risques liés à une augmentation des impôts, voire à l’instauration de taxes provisoires. Certains dirigeants d’entreprises ont – heureusement ! - une approche plus raisonnable que le Medef en expliquant qu’il serait dangereux de casser la croissance en taillant de manière excessive dans les dépenses publiques et donc en affectant la bonne marche des services publics. Ils expliquent, à juste titre, que cette méthode pourrait avoir pour conséquence de continuer à faire monter les populismes de droite et de gauche. Avec, comme risque, celui d’avoir, en 2027, un second tour Mélenchon-Le Pen.

Ce qui nous incite à vous recommander comme lecture dominicale le livre d’Antoine Foucher, ancien directeur de cabinet de Muriel Pénicaud et intitulé "Sortir du travail qui ne paie plus". Celui qui a été responsable du pôle social du Medef suggère notamment de baisser le taux moyen de taxation du travail et d’augmenter celui du capital. Une idée qui est loin de susciter l’enthousiasme, au siège de l’organisation patronale. Mais qui mérite tout de même d'être regardée.

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